Ce matin, comme hier matin, la maison est calme.
Silencieuse.
Mais le silence, quand il hurle, il brise un peu les
tympans.
Et ce matin, comme hier matin, le silence est criant. Pas de
petite voix flûtée. Pas de son sourd annonçant qu’un objet qui ne le devrait
pas vient de s’échouer sur le sol. Pas de petits pas sur le bois flottant. Pas
de « mamaaaaaaan » retentissant à tout bout d’champ.
Silence. Calme.
Plat.
Pas de pieds froids collés sur mes jambes dans le lit, aucun
petit doigt dans mes yeux ou mes oreilles pour me réveiller. Pas de gazon resté
collé aux orteils qui traine partout sur le plancher que j’ai nettoyé et qui garde,
étrangement, plus de dix minutes, son éclat alarmant qu’aucun bloc Légo ne
vient troubler. Aucune course de tite auto dans le salon. Pas de voix
insistante pour obtenir le contrôle de la manette de la télévision. Pas de
yogourt renversé dans un regain de volonté d’autonomie. Pas de lait au
chocolat. Pas d’escargot dans un pot. Pas de boucle à attacher, de bouche à
essuyer, de cheveux à tresser.
Que ce calme trop calme.
Que le frigo qui respire. Un café chaud. Et le bruit
régulier de mes doigts sur le clavier.
Et ce vide.
Ce vide qui m’effrayait et que je dois maintenant apprendre
à garnir. Ce vide que mes enfants avaient magnifiquement empli de leur petite
vie.
Prends du temps pour toi pendant que tes enfants sont chez
leur papa, qu’y disent.
Je le sais. Je le fais. Mais il y a de ces habitudes qui
nous collent à la peau comme un plaster tout frais qu’on tenterait d’arracher.
Et comme j’ai dû un jour accepter le fouilli que ces deux
petites vies foutaient dans la mienne, je dois maintenant apprivoiser l’ordre
qui y règne quand ils sont partis vivre une petite partie de la leur ailleurs.
En buvant du café.
Chaud, pour une fois.