jeudi 8 septembre 2016

Si jamais...

Ma fille, mon garçon. Je sais, je vous ai appris les mots.
Et j'essaie même de vous enseigner les beaux.
Je sais, les enfants, je ne veux pas que vous soyez violents.
Mais cette fois, je devrai changer mon discours,
parce que des exceptions à une règle, il y en a toujours...
(croyez-moi!)

Si jamais mes yeux ne rient plus quand ils se réveillent. S'il fadissent, ternissent.
S'ils ne pleurent plus devant le beau, le grand, le triste.
Si jamais mes yeux pâlissent et ne voient plus les couleurs,
souffrent d'une myopie du bonheur.
Si jamais ils enlaidissent,
secouez-moi, les enfants, pour qu'à nouveau ils embellissent.


Si jamais je ne hurle plus avec vous les paroles de nos chansons préférées en conduisant
et que la musique ne joue plus à tue-tête pendant qu'on se cuisine nos repas.
Si jamais je ne danse plus avec vous à tout bout d'champ
et que mes pas deviennent lourds, pesants.
Si jamais le silence prend la place de nos chants,
les enfants, n'hésitez pas, bousculez-moi.


Si jamais je chuchote mes mots et qu'ils se font moins nombreux,
Que mes rires fusent moins forts et moins joyeux,
que mes gestes deviennent discrets et impatients.
Si jamais j'oublie que c'est la folie qui la rend belle, la vie, il faudra me frapper, les enfants.
Frappez fort, ne vous retenez pas.
Les enfants, ne soyez pas cléments.
Je veux un uppercut dans les dents.
Réveillez-moi.
Redites-moi, que la grisaille et le trop droit, ce n'est pas moi.

Promettez-moi, les enfants,
de me rappeler violemment qui je suis,
si jamais moi, je l'oublie.