lundi 16 septembre 2013

Phallusophie

Le phallus, symbole de virilité, de fertilité, de force, c'est bien connu, prend une importance capitale dans la vie de chaque homme. (Et de quelques femmes, avouons-le.) Je suis une fille, mais détrompez-vous, je suis capable de comprendre la quasi obsession de l'homme pour son pénis : un de mes plaisirs, lorsque j'allaitais mes enfants, était de faire des concours de qui pisse du lait le plus loin. Si j'avais un pénis, chose que j'ai secrètement souvent souhaitée - comme on souhaite un nouveau livre ou un nouvel ordinateur, en se disant que ce serait respectivement soit excessivement divertissant, soit très pratique - j'expérimenterais le jet. Surtout dans la neige. J'ai toujours rêvé de pisser mon nom.

Bon. J'avoue. Le sujet est spécial. Surtout pour un lundi soir.

C'est que j'ai découvert, lors d'une discussion philosophique profonde avec quelques collègues, vendredi passé, qu'il y a quelque chose de pire que de ne pas avoir de pénis : avoir un garçon à qui il faut apprendre à gérer son pénis! Non seulement je ne connaîtrai jamais le plaisir de me soulager dans un urinoir, mais en plus, je devrai enseigner à mon fils à le faire avec tous les désagréments que cet apprentissage comprend et ce, sans jamais en tirer égoïstement profit.

Je t'explique, lecteur médusé.

Les premiers pipis, dans le pot ou la toilette, se soldèrent inévitablement par une flaque sur la céramique. "C'est pas supposé être simple, faire pipi, quand on est un gars?!" pensai-je. Ensuite, vint le premier pipi debout, lors d'une visite chez le docteur, qui fut l'occasion pour mon fils de découvrir la toilette publique dont la lunette ne forme pas un rond complet. Mon fils s'étant radicalement opposé à l'idée de poser ses fesses dans un trou de lunette de toilette, j'eus alors la brillante idée de l'installer debout sur ladite lunette - il est d'ailleurs encore trop petit, à trois ans et un tiers, pour que ses hanches atteignent le haut du bol - dans le but très avoué de lui faire découvrir les joies d'être un garçon. N'ayant jamais été un garçon moi-même et étant plutôt débutante dans ce genre d'art masculin, je le convainquis alors, dans toute ma naïveté, de pisser. Sans préambule, sans plus de préliminaires. Le pénis libre comme un ballon à l'hélium qu'on échappe dans les grands vents de novembre. Mon fils, le sourire creusant ses fossettes, une lueur espiègle dans l'œil, mon fils, disais-je, tapissa alors joyeusement d'urine les murs, la toilette - cuve, réservoir, lunette, bol - jusqu'au lavabo se situant à pratiquement un mètre de lui. "C'est pas supposé être simple, faire pipi, quand on est un gars?!" rugis-je. Enfin, vint le moment de la pisse extérieure. Riche de mon expérience précédente, j'entraînai mon fils à tenir son pénis pour viser l'endroit arrosable. Mon garçon, enchanté d'expérimenter une technique nouvelle, fit alors jaillir ce qui ressembla plus au jet d'une douche qu'à celui, droit et précis, que je m'étais imaginé. Ses pantalons ne s'en portaient pas mieux que s'il avait été une fille. "C'est pas supposé être simple, faire pipi, quand on est un gars?!" fulminai-je.

Par ailleurs, que penser de cette obsession masculine pour cet encombrant organe de reproduction? Dès que le bébé mâle est en âge d'attraper un jouet, le pénis devient son principal attrait. (J'ai d'ailleurs toujours eu l'impression qu'il fallait traiter ce membre avec délicatesse. Je ne me suis jamais autant fourvoyée!) L'enfant développe alors une relation indéfinissable avec son engin, empreinte de curiosité obsessionnelle et de fierté, qu'il faut savoir calmer dans le but évident d'éviter toute situation gênante en public. Je deviens alors le "surmoi" freudien de mon fils et lui répète, jour après jour, semaine après semaine, mois après mois, année après année, de lâcher son ESTIE de pénis.

Et pis moi? Moi? J'en récolte quoi, moi, qui dois continuer de me salir les fesses sur les lunettes de toilettes?

Rien.

Sauf peut-être le fait, comme le signifiait une collègue, de n'avoir qu'un seul pénis à surveiller puisque c'est un garçon que j'ai...  Mmmouin.

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