jeudi 5 septembre 2013

We don't need no education...

Je vais les aimer. Encore cette année. Pas comme j'aime mes enfants, mais plutôt comme j'aimerais que mes enfants soient aimés. Je vais les aimer malgré le dur, malgré l'armure. Parce qu'en eux, derrière le mur, il y a du beau, toujours. Je vais les aimer même s'ils n'en ont pas envie. Parce qu'ils croient parfois que c'est en détestant qu'ils se feront remarquer. Parce qu'ils croient que c'est en ayant l'air détaché qu'ils se feront regarder. Parce qu'il faut voir plus loin que l'image qu'ils veulent projeter. Je vais les aimer.

Malgré eux, malgré les mots qui vont dépasser la pensée, malgré la frustration qui va parfois monter, malgré les sorties de classe, malgré les verbes supplémentaires à conjuguer, malgré le placotage mal placé, malgré les yeux au ciel, le ton levé, la face de Carême, les moues écoeurées. Malgré tout. Je vais me forcer.

Ils vont quand même se décourager, soupirer, peut-être même doubler. Ils vont continuer, je sais. Et je serai encore exaspérée, essoufflée, épuisée. J'aurai même parfois envie de les détester. Mais je vais continuer. Et je vais les aimer. Comme on aime un enfant malgré tout ce qu'il nous prend. Parce qu'eux aussi sont encore des enfants, pas encore si grands. Ils s'arment comme ils peuvent, ils se carapacérisent, ils se durcifient, un peu trop peut-être. Mais c'est le mou qui est important. Et je sais, c'est pratiquement perdu d'avance, les classes de mots et les participes passés, ce sera toujours à recommencer, chaque année. Mais à défaut d'écrire "es" à la fin des pommes qu'ils auront mangées, quelqu'un de plus les aura aimés. Malgré le dur. Malgré l'armure. Malgré le mur.

6 commentaires:

  1. Quel bon texte Marie-Luce ! Bravo pour la vocation et l'implication d'enseignante comme toi auprès de nos jeunes. C'est drôle, notre nouveau rôle de parents, puis ton métier d'enseignante... c'est un peu comme refaire notre vie à l'envers en changeant les rôles. La perception des choses devient si différente de l'autre côté de la scène.

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  2. Peut-être qu'un jour, un de nos profs nous a regardées en se disant qu'il allait nous aimer quand même... Je pense particulièrement à notre prof de math dans le groupe d'option natation en secondaire 2... (Tu étais bien avec moi, non?)

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    1. Inquiétant... je ne m'en souviens plus... A un moment de ma vie, je sais plus quand, sans doute entre mon 2ième et 3ième enfant puis la job, mon cerveau a fait un genre de sélection... Mon disque dur devait être plein ? Ça doit être dans les éléments que j'ai oublié, le prof de Math, et si j'étais dans l'option natation ? Ouf.

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    2. Le prof de math... Jaws, pour les intimes.

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  3. Bonjour Marie-Luce,

    J'aimerais beaucoup citer quelques passages de ton texte dans l'article de maîtrise en enseignement que je suis en train d'écrire. Ai-je ta permission? Bien entendu, la référence bibliographique sera incluse (nom, titre de ton texte, adresse du blog, etc).

    Marie-Pier Meunier
    www.mariepiermeunier.com

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