Il y a quatre ans, ma fille, ma vie se remplissait.
Il y a quatre ans, mon enfant, mon ventre se vidait.
Il y a quatre ans, au gré des premières
tempêtes d’un hiver déchaîné, mon cœur faisait son tout premier tête-à-tête
avec l’inquiétude, la vraie. Celle qui fait peur par son intensité. Celle qui
nous suit désormais comme une sœur siamoise parasite, celle que j’avais espérée
plus subtile, silencieuse, discrète. Celle qui nous permettrait de tout casser,
de tout bousculer, de tout déplacer, de tout réparer pour le bonheur d’un autre
petit cœur… qui bat, qui vit, qui ressent, qui peine, qui joie, qui rit, qui
pleure … qui aime. Un autre petit cœur qui, il y a quatre ans, battait tout à
côté du mien. ÉTAIT, en quelque sorte, le mien. Puisqu’il était en moi,
n’était-il pas, justement, un peu moi? Et toi, qui as été un peu moi, tu
deviens, à quatre ans, de plus en plus toi, de moins en moins moi. Tu t’entoitises, tu te démoimises, tu te démagnétises, tu te désinfantilises, tu crises d’INdépendance
pendant que tu vis LA dépendance. Tu sais déjà écrire ton nom et demain vient,
c’est jamais long.
Il y a six ans,
ma fille, ma vie se remplissait.
Il y a six ans,
mon enfant, mon ventre se vidait.
Il y a six ans,
je ne savais pas qu’un jour, j’aimerais autant. Je ne pensais qu’aux nuits
blanches, aux couches lavables, à l’accouchement, à l’allaitement. Et maintenant. Maintenant. Je sais tellement,
maintenant, que tout va vite, que rien n’attend. Que les jours s’envolent et
que les souvenirs restent. Et j’aimerais tant arrêter le temps. Et j’aimerais
tant que tu restes une enfant. À cause de la lumière. Celle qui brille dans tes yeux
quand tu ris. Celle qui bouge avec toi quand tu danses. Celle qui m’éblouit trop
tôt, le matin, dans mon lit, quand tu t’y glisses avec tes petits pieds glacés.
À cause de la chanson qui dit qu’un jour, tu grandiras et puis que tu t’en
iras. À cause de la curiosité, qui est si difficile à garder. À cause de tes
joues. À cause des histoires, collées ensemble sur le divan. À cause de tes
sourires pleins de dents. Et pourtant. Le temps va, tout s’en va. Et toi, avec
lui, tu t’embellis. Et peu à peu, je comprends. Tranquillement. Que la lumière
changera, mais qu’elle restera. Que tu grandiras, comme mes sentiments. Qu’un
jour je dirai encore et tu le diras peut-être avec moi : "Je ne
savais pas qu’un jour, j’aimerais autant. "
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